Biographie nationale de Belgique/Tome 1/ALENÇON, François de Valois, duc D’

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ALENÇON, François de Valois, duc D’



* ALENÇON (François de Valois, duc D’), d’Anjou, de Brabant, comte de Flandre, etc., né à Paris en 1556, quatrième fils de Henri II, roi de France, et de Catherine de Médicis, frère de François II, de Charles IX et de Henri III. Le duché d’Alençon, dont il prit le nom, lui avait été donné comme apanage. En 1571, un ambassadeur espagnol, décrivant la cour du roi Charles IX, disait du duc d’Alençon que c’était un cavalier sans consistance, qu’il ne savait faire aucune réponse avec justesse ni aux ambassadeurs ni à personne. Il manifesta toutefois une grande ambition, lorsque, en 1573, le duc d’Anjou (depuis Henri III) alla prendre possession du trône de Pologne. Héritier du nom et des armes de son frère, il s’appuyait sur les huguenots et les politiques et visait à la lieutenance générale du royaume, dans l’espoir de succéder à Charles IX, au détriment du nouveau roi de Pologne. Toutes ses entreprises ayant échoué, il tourna son attention vers les Pays-Bas, soulevés contre la domination espagnole. En 1578, il entra pour la première fois dans ces provinces et s’empara de Binche et de Maubeuge. Après ce succès, il conclut, le 13 août, avec les états généraux, un traité par lequel il promettait formellement d’assister les Pays-Bas contre don Juan d’Autriche. D’autre part, les états généraux lui conféraient le titre de défenseur de la liberté des Pays-Bas et s’engageaient, pour le cas où ils changeraient de souverain, à le préférer à tout autre. Cet engagement fut accompli en 1580. Après qu’Alexandre Farnèse eut obtenu la soumission des provinces wallones, après la prise de Maestricht, les états généraux, cédant aux suggestions de Guillaume d’Orange, résolurent de déférer la souveraineté des Pays-Bas au prince français. Des députés se rendirent au château de Plessis-lez-Tours, où résidait le duc d’Alençon, et celui-ci accepta, le 29 septembre, l’offre des états généraux, après avoir au préalable ratifié un traité qui confirmait les priviléges des Pays-Bas et consacrait, à certains égards, la prépondérance des états. Le duc d’Alençon s’occupa de recruter une armée. De leur côté, les états généraux, pour faciliter et régulariser l’avènement du frère de Henri III, prononcèrent, le 26 juillet 1581, la déchéance de Philippe II. Le duc d’Alençon s’avança vers les Pays-Bas et força le prince de Parme à lever le siége de Cambrai. Il passa ensuite en Angleterre pour presser son mariage avec la reine Élisabeth, dont il recherchait la main depuis longtemps. Leurré par la reine et enfin éconduit, le duc d’Alençon quitta Londres, après trois mois de séjour en Angleterre, et, faisant voile pour la Hollande, débarqua à Flessingue le 10 février 1582. Neuf jours plus tard, il était solennellement inauguré à Anvers comme duc de Brabant. Le mois suivant, il se rendit à Gand, où il fut reconnu et salué comme comte de Flandre. François de Valois, disons-le, était un méprisable souverain ; il avait, selon les expressions du roi de Navarre, « le cœur double et malin et le corps mal basti », et, de même que Henri III, il s’entourait de mignons dont il suivait aveuglément les détestables conseils. Le duc, mécontent des conditions qui lui avaient été imposées à Plessis-lez-Tours, n’était que trop disposé à violer ses serments. Il résolut de s’emparer des principales places du Brabant et de la Flandre, d’y mettre des garnisons françaises et d’imposer ensuite aux états généraux le système du bon plaisir. Le 16 janvier[1] 1583, vers la même heure, les Français, dispersés dans les principales villes, se mirent en mouvement ; mais presque partout ils furent prévenus et désarmés. Le duc s’était réservé Anvers, et il tenta effectivement de s’emparer de la capitale des Pays-Bas. Il était à la tête d’une nombreuse et vaillante armée ; il méprisait la bourgeoisie qu’il se proposait d’asservir ; il entra dans Anvers comme dans une ville prise d’assaut. Les bourgeois s’armèrent, combattirent héroïquement contre les bandes françaises, et celles-ci furent décimées et repoussées. Elles se retirèrent en désordre jusqu’à Termonde, puis elles gagnèrent Dunkerque et finirent par évacuer le territoire belge. Malgré la honteuse déloyauté du duc d’Alençon, Guillaume d’Orange, qui espérait entraîner la France dans une guerre avec l’Espagne, conseillait aux états généraux d’oublier le passé et de se réconcilier avec le frère de Henri III. Les états généraux, surmontant leur répugnance, se décidèrent enfin à envoyer des députés en Champagne, où leur ancien souverain s’était retiré ; mais lorsque ces plénipotentiaires arrivèrent à Château-Thierry, ils trouvèrent le duc d’Alençon à l’agonie. Il mourut à vingt-huit ans, le 10 juin 1584 « d’un flux de sang, dit le Journal de l’Estoile, accompagné d’une fièvre lente qui l’avait petit à petit atténué et rendu tout sec et étique. » Le corps de l’avant-dernier des Valois fut transféré à Paris, où Henri III lui fit célébrer de magnifiques obsèques en l’église de Notre-Dame.

Th. Juste.


  1. ERRATA ET RECTIFICATIONS DU Ier VOLUME : au lieu de : 16 janvier, lisez : 17 janvier.