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maistre.robert.estoit. nomes.
et.de.luzarches.surnomes.
maistre.thomas.fu.apres.luy.
de.cormont.et.apres.sen.filz.
maistre.regnault.qui.mestre.
fist.a.chest.point.chi.cheste.leitre.
que.l’incarnacion.valoit
xiii.c.ans.moins.xii.en.faloit.

Pierre de Montereau, ou de Montreuil, était chargé par le roi saint Louis de construire, en 1240, la Sainte-Chapelle du Palais à Paris, et par les religieux de Saint-Germain des Prés, d’élever la charmante chapelle de la Vierge, qui couvrait une partie de la rue de l’Abbaye actuelle. Pierre de Montereau était laïque ; on prétend que saint Louis l’emmena en Égypte avec lui, le fait est douteux ; et si Pierre de Montereau fit le voyage d’outre-mer, il ne s’inspira guère des édifices arabes qu’il fut à même de visiter, car la Sainte-Chapelle ressemble aussi peu aux anciens monuments du Caire qu’aux temples de Pestum. Quoi qu’il en soit, la légende est bonne à noter en ce qu’elle donne la mesure de l’estime que le roi saint Louis faisait de l’artiste. Pierre de Montereau fut enterré avec sa femme au milieu du chœur de cette belle chapelle de Saint-Germain des Prés, qu’il avait élevée avec un soin particulier et qui passait à juste titre pour un chef-d’œuvre, si nous jugeons de l’ensemble par les fragments déposés dans les dépendances de l’église de Saint-Denis. Cette tombe n’était qu’une dalle gravée ; elle fut brisée et jetée aux gravois lorsque la chapelle qui la contenait fut démolie.

Libergier construisit à Reims une église, Saint-Nicaise, admirable monument élevé dans l’espace de trente années par cet architecte ; une belle et fine gravure du XVIIe siècle nous conserve seule l’aspect de la façade de cette église, la perle de Reims ; elle fut vendue et démolie comme bien national. Toutefois les Rémois, plus scrupuleux que les Parisiens, en détruisant l’œuvre de leur compatriote, transportèrent sa tombe dans la cathédrale de Reims, où chacun peut la voir aujourd’hui ; c’est une pierre gravée. Libergier tient à la main gauche une verge graduée, dans sa droite un modèle d’église avec deux flèches comme saint Nicaise ; à ses pieds sont gravés un compas et une équerre ; deux anges disposés des deux côtés de sa tête tiennent des encensoirs. L’inscription suivante pourtourne la dalle :


C ci.git.maistre.hues.libergiers.qui.comensa.ceste.eglise.an.lan.de. lincarnation.m.cc.et.xx.ix.le.mardi.de.paques.et.trespassa.lan.de. lincarnation.m.cc.lxiii.le.samedi.apres.paques.pour.deu.priez.por.lui[1]

  1. Voy. la Notice de M. Didron sur cet architecte et la gravure de sa tombe. Annales archéologiques, t. I, p. 82 et 117.